
Publié le 01/07/2025
Bruno Mattéi était un enseignant de philosophie à la retraite, engagé dans des actions sociales, notamment avec l’association ATD Quart-Monde et auprès des Roms à Roubaix. Sa réflexion sur la fraternité s’articule autour de l’idée que la fraternité doit s’apprendre et qu’elle représente une démarche personnelle et collective essentielle pour vivre en harmonie.
Ateliers sur la Fraternité
- Mattéi propose des ateliers sur la fraternité où il évite le discours philosophique abstrait pour se concentrer sur des expériences concrètes.
- Il souligne que la fraternité est souvent confondue avec la solidarité, qu’il considère comme une version atténuée de la fraternité.
- Il s’inspire de la Genèse, en particulier du récit du meurtre d’Abel par Caïn, pour poser des questions fondamentales sur notre capacité à vivre en tant que frères.
Développement Personnel et Transformation Sociale
- Les ateliers visent à remuer les participants, les confrontant à leurs propres peurs et résistances intérieures.
- Mattéi affirme que vivre en fraternité nécessite un travail intérieur, un processus de transformation personnelle qui peut avoir des répercussions sociales.
Fraternité et Société
- Il observe que la fraternité est de plus en plus difficile à vivre dans la société actuelle, où le discours sur la fraternité est souvent absent.
- Mattéi élargit même le concept de fraternité aux relations de couple, suggérant que la découverte de la fraternité peut enrichir ces relations.
Héritage et Réflexion
Bruno Mattéi laisse un héritage important dans la réflexion sur la fraternité, tant sur le plan philosophique que pratique, en insistant sur la nécessité d’un engagement personnel et d’une transformation sociale à travers des actions concrètes.
La République n’est pas fraternelle, par Bruno Mattéi
Fraternité et solidarité relèvent de deux univers, de deux logiques différentes.
Depuis son entrée sur la scène politique, au moment de la Révolution française, la fraternité a toujours paru aussi indispensable qu’embarrassante. Un de ces mots qui ont « plus de valeur que de sens », pour reprendre l’expression de Paul Valéry, ou qui font figure de « grand signifiant flottant », pourrait dire un psychanalyste : attrayant à cause de sa dimension affective en forme de supplément d’âme, mais tout aussi suspect et inassimilable à la raison républicaine dès lors qu’il s’est agi de la faire jouer comme principe juridique et éthique.
… les républicains de la IIIe République pensaient que la fraternité était impossible à réaliser, tandis que la solidarité était plus à la portée d’une collectivité qui pourrait consentir à redistribuer des richesses et rétablir de la justice sociale.
… Le philosophe Levinas a eu cette expression encore inouïe en parlant du « fait originel de la fraternité ». Avant d’être un idéal ou une utopie, elle est d’abord une donnée, certes à faire advenir, mais que nous n’avons précisément pas encore expérimentée, enfermés que nous restons depuis des millénaires dans de vieilles peurs archaïques et égotiques qui transforment l’autre – individu ou collectif – en concurrent ou en ennemi potentiel. Faute de nous être décidé à cette expérience, et à « la vie bonne » qu’elle annonce, nous avons intériorisé la fraternité comme nostalgie secrète de l’inaccompli. Nous l’invoquons seulement lorsque la République est en péril, et que nous croyons en discerner quelques prémices dans des rassemblements sans lendemain. Au risque d’avoir accouché d’un « fraternisme », mouture seulement plus chaleureuse du solidarisme des ancêtres !