Résumé – Chapitre 26 – POLICE- «LA SOCIÉTÉ QUI VIENT» DIDIER FASSIN

La societe qui vient - Didier Fassin - Résumés LVN

Publié le 10/07/2023

« La Société qui vient » sous la direction de Didier FASSIN
éditions du Seuil, 2022, 1319 p.
Chapitre 26 – Police de Jérémie GAUTHIER pages 491 à 508

Depuis 2010 on constate de par le monde de nombreux conflits au cours desquels la violence policière s’exprime de façon remarquable. A titre d’exemple la manifestation des gilets jaunes a été confrontée à une brutalité policière inédite depuis 1968.

Grâce aux nouvelles technologies l’omerta a été levée. Le monopole du récit des autorités sur les scandales policières a été brisé. L’ensemble des travaux sur cette thématique invite à mettre à l’épreuve l’expression des forces de l’ordre. Mais de quel ordre sont-elles la force ? Quels sont les effets sociaux et politique de cet ordre ?

Actuellement l’usage de la force policière tend à s’émanciper des principes visant à l’encadrer dans les textes français et internationaux. Historiquement la police renvoie à l’ensemble des techniques de gouvernement visant à garantir et à renforcer le pouvoir de l’état. L’ordre produit par la police est donc indistinctement social, politique, économique et moral.

La police évolue sur une ligne de crête d’un côté les intérêts du pouvoir et de l’autre la garantie des libertés individuelles et le service de l’intérêt général. Sur le terrain le travail des policiers émane des exécutants qui bénéficient d’un pouvoir discrétionnaire avec cette tension permanente entre

  • la démocratisation de son mandat et le contrôle de son action
  • la tendance à s’émanciper

La conversion d’une partie de l’élite politique à l’idéologie néolibérale s’est accompagnée d’un investissement croissant dans les discours et les moyens sécuritaires. Elle se traduit par une hypertrophie du mandat policier concernant la gestion des banlieues, le maintien de l’ordre et la lutte contre le terrorisme. C’est une gestion musclée de problèmes qui dépassent le seul périmètre du contrôle des désordres et de la délinquance. A partir de la fin des années 1970, le pôle sécuritaire de l’action de l’état règne sur les banlieues en prenant la place de la police de proximité et la mise en place de la politique du chiffre demande de plus en plus d’indicateurs quantitatifs de mesure de l’activité policière.

Il en découle un style de police agressif utilisant des unités spécialisées intervenant sans distinction dans les quartiers défavorisés.

L’excès de coercition et la réponse défaillante aux attentes des administrés constituent les 2 facettes de l’échec du service public.

Un rappel historique, l’encadrement de foules protestataires était confié à l’armée jusqu’au début du XXème siècle, il passera ensuite à la police avec le soucis d’éviter la mort des protestataires ou des policiers. Cette stratégie pacifique a été battue en brèche par un renouveau de la brutalisation depuis les années 2000. La néolibéralisation du droit du travail et de l’état a perverti les conditions du vivre ensemble.

La vague d’attentats d’inspiration islamiste met à mal l’État, les organisations policières, et les libertés individuelles. L’état d’urgence est déclaré en 2015 et les principales dispositions passent en 2017 dans le droit commun, élargissant ainsi les pouvoirs de la police.

Le maintien de l’ordre, le terrorisme et les banlieues ont justifié la mise en place de lois sécuritaires et d’un discours politique visant l’ennemi de l’intérieur. La police gère le traitement d’enjeux indissociablement sociaux, économiques et politiques. Elle est ainsi sollicitée par l’ensemble des catégories sociales pour un éventail quasi infini de motifs.

Dans l’ensemble la confiance accordée aux forces de l’ordre est généralement supérieure à celle attribuée à la justice, aux parties politiques, aux gouvernements. Mais ce taux diminue parmi les jeunes des catégories populaires, des groupes minoritaires. Les forces de l’ordre sont perçues comme le service public le plus inégalitaire, ce sentiment d’iniquité est très forts parmi les minorités socio-raciales.

La brutalité policière se heurte à un déni politique et aux stratégies de blocage des syndicats policiers dues aux héritages coloniaux.

L’histoire de la pratique policière française s’inscrit dans une pratique de contrôle des populations indésirables. Depuis 1940 la police a une grande pratique du fichage vis à vis des étrangers, des nomades, des juifs, des colonisés. En 1955 la carte d’identité nationale voit le jour dans le contexte de la guerre d’Algérie.

Apparaissent les expressions Français musulmans d’Algérie, type nord-africain, expression encore utilisée actuellement.

Les recherches montrent l’existence d’un racisme spécifiquement policier. Les recrues tendent à interpréter par une grille de lecture racialisée les conflits qui émaillent le quotidien. Ce phénomène est toléré voire encouragé par la hiérarchie policière.

Ce racisme policier a été repris dans le débat public depuis 2010. La parole politique a admis l’existence d’un problème, mais il est transféré sur quelques cas individuels.

E. Macron reconnaît le contrôle au faciès mais il ne reconnaît pas l’existence de violences policières et d’un racisme systémique.

Le caractère systémique engage la responsabilité de l’institution et de l’autorité politique. Un travail serait à entreprendre pour faire naître une prise de conscience de cette déviation. La France devrait prendre en compte la démarche du Royaume-Uni qui s’est attaqué au problème au début des années 2000.

Il y a une pluralité du maintien de l’ordre reposant sur une ambivalence.: les intérêt de la société et le pouvoir politique. En France depuis les années 2000 la radicalisation des référentiels sécuritaires s’est accrue, avec une relégation des enjeux de démocratisation des forces de l’ordre. La résistance aux réflexes autoritaires nécessite que la police soit placée sous le regard d’exigence démocratique radicale.

Jérémie GAUTHIER CV: https://sspsd.u-strasbg.fr/Jeremie-GAUTHIER

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