Publié le 30/07/2018
Par Jean Travers, Groupe LVN de Rennes
L’intérêt du groupe LVN de Rennes pour les migrants est ancien. Mais s’il fallait donner une date, c’est l’ouverture du Centre de rétention administrative (CRA) de Rennes St-Jacques en 2007 qui a probablement sensibilisé les vie-nouvelliens à la situation des « sans-papiers ». Par ailleurs, Bernard Philippe, membre de LVN[[Membre du groupe local de Rennes, chercheur en mathématiques à l’université de Rennes, en lien avec les USA et le Cameroun sur le plan universitaire et donc témoin des difficultés des étudiants camerounais, entre autres, pour obtenir des visas pour la France]], qui travaillait à l’Université de Rennes, a attiré l’attention sur les difficultés rencontrées par les étudiants étrangers auprès des consulats français et plus généralement par tout étranger demandant un visa pour la France.
Fin 2009, le week-end régional (Bretagne) sur l’hospitalité lance l’action en faveur des migrants dans plusieurs directions : sur le plan social (alphabétisation des migrants, accompagnements dans les démarches administratives…), sensibilisation de nos concitoyens, soutien aux personnes sans papiers (visites au CRA), formation des membres du Groupe aux questions soulevées par les migrations. Des contacts se nouent avec la Cimade, Un Toit c’est un Droit, le MRAP, RESF…
En 2010, un « groupe de suivi » se met en place pour soutenir l’action des visiteurs au CRA et de ceux qui vont accompagner les retenus lors des audiences judiciaires ou administratives ; le 15 décembre 2010, soirée ouverte de l’atelier Nord-Sud sur la question des migrants (Loi Besson, courriers à Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux de privation de liberté… : cf. article de J. Travers du 10 mars 2010 pour Le Colporteur (bulletin de LVN Rennes).
En 2011, B. Philippe ouvre un réseau confidentiel sur Yahoo-groupes Welcome 35 pour faciliter et protéger les échanges d’e-mails entre visiteurs ; une quarantaine de personnes intéressées s’y inscrivent… alors que le nombre de visiteurs[[ les visiteurs au CRA sont soit des bénévoles de la Cimade, soit des membres de la famille ou des amis des retenus, soit des volontaires, militants d’associations ou non.]] ne dépasse pas la dizaine et compte plusieurs militants hors LVN. Un article de Danielle le Texier et de J. Travers fait le point sur l’évolution de la législation et le passage de la gendarmerie à la PAF (Police de l’air et des Frontières) pour assurer le gardiennage des retenus ; la réflexion s’approfondit sur l’effet pathogène du CRA (solitude, humiliation, stress…).
En 2012, le groupe de suivi se transforme en « groupe de paroles » ; d’autres sujets y sont abordés, dont le projet Bienvenue !, accueil temporaire de migrants (demandeurs d’asile) dans des familles de la région rennaise.
Fin septembre 2012, LVN participe, à Massy, à l’Observatoire de l’Enfermement des étrangers, en France et dans divers pays européens ; un compte-rendu de l’atelier sur les questions de santé est rédigé par J. Travers sur les facteurs structurels et personnels des maux de la rétention (29 septembre 2012). Les déplacements à Paris permettent de tisser des liens, en particulier avec le Groupe LVN Vallée de la Bièvre.
En 2013, Jacques Darlot, président de LVN Rennes, demande au chef de Centre du CRA une entrevue au sujet de la défense des droits des retenus, de leurs conditions de séjour ou de sortie : le courrier essuie une fin de non-recevoir… L’association Bienvenue ! accueille ses premiers migrants demandeurs d’asile.
LVN Rennes participe à la soirée organisée à Nantes au cinéma « Le Concorde » : projection du film Contre les Murs, avec la participation de la réalisatrice ; le film a été tourné en 2011-12 à Lyon et à Toulouse devant le CRA de Cornebarrieu. LVN participe à la campagne Open Access Migreurope à Paris et répond à un questionnaire préparatoire sur les lieux d’enfermement fin 2013.
En 2014, le film Contre les Murs est projeté au cinéma « L’Arvor » de Rennes, devant une salle comble ; les dons de nombreux participants viennent nourrir la cagnotte de Welcome 35 qui vient en aide aux retenus très souvent à court d’argent (vêtement, livres, revues, cigarettes…). LVN Rennes tient les comptes de cette cagnotte et y puise, voire l’abonde, pour rembourser les dons des visiteurs au profit des retenus. Quant à l’accueil des demandeurs d’asile, plusieurs familles accueillies par Bienvenue ! « migrent » au nord de Rennes dans un squat qui occupe l’ancienne église St-Marc, désaffectée… Par ailleurs, l’action se poursuit ; la réflexion aussi (cf. l’article de J. Travers : « La souffrance en CRA : un monde à l’envers » du 22 mai 2014). Le petit groupe des visiteurs traverse, bon an mal an, des moments de doute sur la pertinence ou l’utilité des visites et peine à recruter de nouveaux membres.
Fin 2015, enfin trois nouveaux visiteurs arrivent : deux femmes et un homme. Le groupe participe de temps à autre à des « parloirs sauvages » qui, de l’extérieur des grilles du CRA, permettent d’échanger quelques informations avec les retenus à l’intérieur ; en principe, la police tolère ces échanges, néanmoins, des bâches ont été disposées tout autour du CRA pour les empêcher…
Quelques membres de LVN participent aussi aux différentes manifestations qui tentent d’alerter la population sur les CRA.
En 2016, deux d’entre nous se rendent à l’OFII (Office Français de l’immigration et de l’intégration), pour se renseigner sur les aides au retour volontaire qui sont de trois sortes : – sur le plan social, – sur l’aide à la formation et à la recherche d’un emploi, – sur l’aide au financement d’un projet professionnel (création d’entreprise). Il arrive que des retenus, las de la galère qui n’en finit pas, souhaitent rentrer au pays… Mais cela reste l’exception.
En 2017 et 2018, la Cimade qui, jusqu’alors, nous informait régulièrement de la présence de retenus demandeurs de visites, connaît des changements de personnels et les informations se font plus rares ou aléatoires. En revanche, l’OFII prend le relais et nous signale les demandes de visites ou les besoins de certains retenus en habillement (chaussures, pulls…), en monnaie, en tabac, etc.
Actuellement, notre petit groupe de 7/8 personne tente de renouer avec les bénévoles de la Cimade… Il nous semblerait judicieux d’harmoniser nos pratiques, d’éviter les doublons (visites répétées au même retenu), et de collaborer plus étroitement dans la lutte pour un meilleur accueil des étrangers en France.
Durant toutes ces années, LVN participe également aux Cercles de Silence le premier mercredi de chaque mois sur la place de la mairie et certains membres font partie du collectif d’associations qui pilote cette action non-violente.