Souffrance au travail : Éléments bibliographiques

Publié le 10/01/2012

Par Agnès Moillo-Batt, Groupe de Rennes, Comité de rédaction

Suite à ses recherches, le groupe de Lyon/Saint-Etienne dispose d’une bibliographie assez complète sur le sujet. Voici quelques références significatives.


Faisons remonter au premier ouvrage de M.-F. Hirigoyen, psychiatre et victimologue, la première référence au harcèlement moral, forme d’agression psychique. Dans cet ouvrage (Harcèlement moral : la violence perverse au quotidien, édition La Découverte, 1998), elle ne sépare pas le harcèlement moral dans la sphère privée ou dans la sphère publique (travail, contacts sociaux…). Ce livre fera date et provoquera une déferlante de témoignages et la médiatisation de situations dramatiques.

En 2001, M.-F. Hirigoyen, reviendra sur ces notions car dans le très grand succès de l’ouvrage, l’auteur distinguait une distorsion liée à l’emploi du terme moral (ce même concept qualifié de psychologique, eût signifié qu’il s’agissait uniquement d’une étude pour spécialistes sur des mécanismes psychologiques). Dans cet ouvrage, le champ d’investigation est limité au travail (Malaise dans le travail : harcèlement moral – démêler le vrai du faux, édition La Découverte, 2001). Le harcèlement moral au travail se définit comme toute conduite abusive (geste, parole, comportement, attitude…) qui porte atteinte, par sa répétition ou sa systématisation, à la dignité psychique ou physique d’une personne, mettant en péril l’emploi de celle-ci ou dégradant le climat de travail.

Dans le même temps, C. Dejours publie la 3ème édition de son livre Travail, usure mentale (Bayard Éditions, Paris, 2000), essai de psychopathologie du travail, « analyse de la souffrance psychique résultant de la confrontation des hommes à l’organisation du travail ». L’ouvrage passe en revue dans le champ des stratégies défensives, de la peur dans les tâches soumises à cadence, les différentes formes de peur, etc.

Au fil du temps, de nombreuses recherches critiques encouragent un passage de la pathologie à la normalité, ce qui conduit l’auteur à une autre appellation, celle de psychodynamique du travail. Celle-ci, en s’insérant dans le champ de la santé, se démarque de la médecine du travail (prévenir, dépister, soigner) et de l’ergonomie (action sur les conditions de travail). Cette somme s’écarte délibérément des aspects quantitatifs et épidémiologiques (questionnaires, statistiques, patterns comportementaux…) du travail.

En 2006, paraît, sous la direction de N. Combalbert et C. Riquelme-Sénégou, une analyse de la diversité des risques, réalisée par un panel de consultants et d’experts multidisciplinaires (Le Mal-être au travail : souffrance psychique, harcèlement moral, stress, agressivité et conflits, violence au travail, burn out, Paris, Presses de la Renaissance, 2006). L’ouvrage est très documenté en cas réels rencontrés sur les lieux de travail et ouvre une porte sur les risques professionnels et les problèmes de santé publique, de plus en plus graves. Les analyses sont effectuées du point de vue de consultants dans une entreprises. Les médecins généralistes au contact quotidien d’une population fragile, stressée, inquiète… risquent de ne pas y trouver leur compte.
Plus près de nous, citons un essai sans ambition théorique – au dire de l’auteur, Dominique Huez, médecin du travail dans une centrale nucléaire (Souffrir au travail, Paris, éditions Privé, 2008). Les projecteurs sont braqués sur un aspect non encore abordé, dans un contexte où il est courant de rejeter la responsabilité des passages à l’acte violents sur des motifs d’ordre privé ou familial, l’auteur retourne la question : se pourrait-il que les conditions de travail se dégradent tellement du point de vue des personnels que la vie familiale en paye les conséquences ? Mais, observe-t-il, il est plus facile pour une entreprise d’incriminer l’entourage et créer une cellule d’écoute que de poser la question de sa propre responsabilité.

Signalons enfin le livre de Jacques Baugé, médecin du travail, et Daniel Pierrejean, de formation juridique, cadre, syndicaliste et ancien conseiller prud’homal (Mal-vivre au travail : stress, harcèlement, mondialisation, comprendre, repérer et agir, éditions Paulo-Ramand, Nantes, 2010). Le champ est vaste mais les qualifications des auteurs offrent un complément intéressant par rapport à des ouvrages cités plus haut. C’est le cas d’un grand nombre de cas concrets de détresse présentés avec une grande empathie (usure dans les centres d’appels, « le poids de la pendule, le choc du stress », crise, etc.). De plus ces cas sont présentés sous différents angles de vue (coût, soins, attention à la personne, etc.) peu ou pas abordés ailleurs.

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