Yann et Claire cultivent bio

Publié le 29/09/2011

Geneviève Lelong, groupe de Rodez

Histoire : Yann prend la succession de ses parents en 1994 sur une ferme de 75 ha groupés autour de la maison. Le tout est en fermage. En 1996 la décision est prise de passer au bio pour obtenir le label en 1998.
Se convertir au bio n’est pas si simple : passer de 10 000 litres de lait par vache et par an à 4 500 litres n’est pas dans l’air du temps, les parents sont parfois inquiets pour l’avenir. Dans l’agriculture, l’évolution normale est l’agrandissement, et la formation dans les écoles d’agriculture prend difficilement en compte les mutations en bio.


« Claire et moi avions déjà bien réfléchi avant de nous installer et ce choix du bio, du non intensif s’imposait par respect du consommateur, des générations futures, de la santé de l’agriculteur, des animaux. »
Au début ils s’organisent en GAEC à trois (Groupement agricole d’exploitation en commun) puis en EARL entre Yann (paysan) et Claire (salariée de l’EARL).

Deux salariés travaillent sur l’exploitation : Fabien à 65% en phase d’installation en maraîchage bio, Olivier à 100% et aussi un apprenti en formation de gestion des espaces naturels. Les gros travaux sont effectués par la CUMA (Coopérative d’utilisation de matériel agricole), afin d’avoir peu d’investissement en matériel et de pouvoir embaucher des salariés, en effet il y a beaucoup de monde pour l’activité de cette ferme de 75 ha.

La vie sur la ferme
• Le lait
Les 43 vaches laitières normandes (race mixte lait-viande) sont dans les prés durant 10 mois (système herbager), seuls 2 mois d’hiver sont passés complètement à l’étable.
Sur 75 ha : 55 sont consacrés à l’herbe, 15 aux céréales, 2,5 au maïs et 2,5 aux féveroles.
Toute l’alimentation du bétail est fabriquée sur la ferme (100 % d’autonomie) il ne reste qu’à acheter du sel et des amendements calcaires.
Il en résulte une autonomie maximale.
Ainsi la ferme a un quota laitier de 255 000 l/an mais n’en produit que 180 000… Ce n’est pas une production intensive mais c’est dans la philosophie de la maison. Le lait est vendu à Biolait (coopérative de collecte) qui regroupe 500 producteurs à travers toute la France. Le lait est distribué dans le réseau Biocoop. Il est payé au producteur 430 € la tonne (330 € en production conventionnelle).
Dans les Côtes-d’Armor en trois ans le nombre de producteurs de lait bio est passé de 17 à 50 et il y a encore d’énormes possibilités pour ceux qui voudraient se lancer dans l’aventure…

• La viande
Les vaches de réforme sont vendues à UNEBIO à 20 % de plus que dans le système conventionnel. Les veaux restent sous la mère quelques semaines et sont ensuite vendus à un éleveur de veaux bio autour de 300 € par tête (en conventionnel autour de 100 à 150 €).
Les génisses sont gardées sur l’exploitation pour renouveler le troupeau de vaches laitières.
La reproduction est faite par insémination artificielle sauf pour les génisses.

• Les céréales et le pain
Les céréales produites sur l’exploitation sont entièrement vendues à un meunier (ancien associé) qui a un moulin Astrier (meule de pierre qui tourne doucement). Ce blé, choix des variétés en fonction de la qualité boulangère, est transformé au moulin en farine de type 80.
Le travail du meunier est payé en blé.
Le fournil est installé à côté du moulin et c’est là que Claire fabrique entre 120 et 150 kg de pain par fournée (1 fois par semaine).
La commercialisation se fait à travers « La Binée Paysanne » qui regroupe 15 producteurs avec une variété de produits[[1 – Voir le site internet : http://www.labineepaysanne.com/]].
Les consommateurs passent leur commande sur le site Internet une fois par semaine et récupèrent leur panier dans neuf lieux différents. Un salarié vient d’être embauché.
Depuis sept ans cela fonctionne bien et le principe essaime dans toute la France.
La vente de pain en direct donne une forte valeur ajoutée aux céréales.

Cahier des charges Bio et méthode de travail

En bio on nourrit le sol qui nourrit la plante.
Pour les cultures : interdiction des engrais chimiques, des pesticides, des herbicides. Les animaux doivent manger du bio et il est interdit d’utiliser des hormones pour l’insémination. En revanche on peut utiliser des antibiotiques quand les bêtes sont malades.
Sur cette ferme l’herbe reste en place environ sept ans. Après on sème du blé la première année et la deuxième souvent un mélange triticale-avoine ; la terre est labourée pour contrôler l’herbe. Les semis se font à l’automne car la terre est mouillée.
La terre est limoneuse avec une forte acidité PH du sol à 6,3. Au démarrage il y avait excédent de phosphore mais actuellement inutile d’amener grand-chose en complément.
Le fumier est composté en 6 semaines et utilisé pour les cultures. Le suivi des bêtes se fait en lien avec un vétérinaire du Jura qui applique la méthode Obsalim (observation alimentaire)[[2 – Pour en savoir plus : http://www.obsalim.com/ ]].
Au niveau de la gestion de la ferme, la comptabilité est faite par les agriculteurs, avec une adhésion à l’AFOC (organisme de gestion lié à la Confédération paysanne). Les orientations ne dépendent pas d’organismes extérieurs, les fermiers assurent eux-mêmes le contrôle laitier ; il n’y a plus d’emprunt à la banque et l’équilibre financier est bon ; les aides PAC (26 000 €) servent à payer les salariés.
Yann passe beaucoup de temps à l’extérieur, au moins une journée par semaine, pour assurer la vie du réseau bio qui compte 330 adhérents, la participation au syndicat Confédération paysanne, etc…
Bref des agriculteurs heureux qui travaillent, certes, mais qui ne vivent pas dans le stress du lendemain, qui vivent suivant leurs convictions et qui ne sont pas isolés socialement, c’est un choix de vie bien réfléchi et bien conduit.

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