60 années de mutations dans l’agriculture française

Publié le 29/09/2011

Par Raymond Girou, groupe de Nantes

De la Libération à nos jours l’évolution du monde agricole traverse deux grandes périodes.


A la sortie de la guerre, 208 000 exploitations étaient partiellement ou totalement sinistrées. La production agricole en 1945 ne représentait plus que les deux tiers de celle de 1938 et notre pays devait importer des produits alimentaires pour combler son déficit. Le rationnement est resté en vigueur jusqu’en 1949. Cette pénurie a marqué en profondeur notre mémoire collective et orienté la politique agricole jusqu’à nos jours vers une forte productivité, afin de garantir la sécurité alimentaire.

1945-62 : de la pénurie aux excédents agricoles

Les plans Monnet et Marshall ont permis la reconstruction de l’appareil de production et une accélération de la modernisation.

La modernisation résulte de la combinaison de plusieurs facteurs : la mécanisation, l’utilisation des engrais et des amendements, la sélection des animaux et des végétaux et la présence d’une jeunesse nombreuse formée par la J.A.C. (Jeunesse agricole catholique) et l’enseignement agricole. Tous les efforts vont converger vers la productivité, et l’autosuffisance alimentaire est atteinte dès 1960. A ce moment-là se pose le problème de l’exportation plutôt que la limitation de la production, car l’agriculture est considérée comme une richesse nationale et une source de devises extérieures.

Les Lois d’orientation de 1960 et 1962, sous la houlette d’E. Pisani, vont fournir le cadre juridique pour adapter les structures aux besoins de la politique agricole. Ainsi, par exemple, sont créées les SAFER (Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural) pour l’aménagement du foncier, les GAEC (Groupements agricoles d’exploitation en commun), les groupements de producteurs pour la commercialisation des produits…

1962-2011 : du marché national au marché européen

En 1962 la PAC (Politique Agricole Commune) est créée au sein de la Communauté économique européenne (C.E.E.).
Depuis cette date, l’agriculture française s’est insérée dans le marché européen. La PAC a trois objectifs principaux :

• accroître la productivité agricole ;

• élever le niveau de vie de la population agricole ;

• garantir la sécurité alimentaire de L’europe.

Dès les années 70, l’auto-suffisance alimentaire est atteinte en Europe, grâce aux soutiens des produits agricoles, en fonction des quantités produites.

Pour écouler ses excédents, la C.E.E développe les exportations sur le marché mondial, en adhérent au GATT (General agreement on tariff and trade) en 1975, puis à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). La France va devenir le deuxième exportateur mondial de produits agricoles.

Mais les exportations ne suffiront pas à absorber tous les excédents et une limitation des productions sera mise en œuvre, notamment avec les quotas laitiers et la mise en jachères de terres au niveau des cultures végétales. La PAC sera orientée vers des aides directes au revenu des agriculteurs plutôt que vers le soutien de la production et des prix, notamment depuis 1992.

Les besoins des consommateurs et des citoyens, en matière d’environnement et de qualité des produits, sont pris en compte dans la PAC à partir des années 2000.

Il faut noter une grande inégalité dans la répartition des soutiens européens, 80 % des aides allant à 20 % des exploitations agricoles.
Une nouvelle PAC est en cours d’élaboration et elle devrait être votée en 2012.

La population active agricole représente en 2010 3 % des actifs de notre Pays, contre 30 % à la Libération. Les exploitations restantes ne cessent de s’agrandir pour atteindre une surface moyenne de 77 ha à ce jour.

Une agriculture française très diversifiée

On peut parler des « agricultures » tant la diversification est grande. Aujourd’hui la production agricole est composée essentiellement de trois grands courants inégaux :

• un courant intensif qui accorde la priorité au rendement et qui, progressivement, tient de plus en plus compte de l’environnement sous forme de contraintes (agriculture raisonnée).

• un courant biologique qui cherche à valoriser les processus écologiques et qui s’interdit tout emploi de produits de synthèse. Il est relativement facile à certifier. Ce mouvement est né dès 1920 dans le monde par réaction à l’avènement de l’agrochimie. L’appellation « biologique » ou « bio » correspond à une certification reposant sur des normes et des cahiers des charges. En France, l’Association Française pour l’Agriculture Biologique (AFAB) a été fondée en 1962. Le bio occupe seulement 2,5 % de la surface agricole française en 2009, mais elle progresse fortement. L’objectif du Grenelle de l’environnement est d’atteindre 6 % dès 2012.

• un courant dit de culture intégrée ou d’intensification écologique qui prend le courant biologique comme prototype de gestion des processus écologiques, mais qui ne s’interdit pas, pour les piloter, l’usage de produits de synthèse. Il est du coup plus difficile à certifier.
Le grand défi de notre agriculture est de produire plus et mieux, afin de contribuer à l’alimentation mondiale, avec toujours moins de surface agricole disponible du fait de l’urbanisation.

Partager cet article :

S'inscrire à la newsletter

Newsletter

Suivez l'actualité de l'Association LVN avec la lettre d'information trimestrielle