Publié le 21/12/2011
Ce sont deux grandes figures de la résistance à l’inhumanité et aux impersonnalismes de notre temps, l’un en Afrique, l’autre en Europe. Il y a bien des points communs dans leurs parcours de vie respectifs.
Depuis que j’ai découvert les résonances entre l’Afrique, le Proche-Orient et l’Europe centrale & orientale, je vois mieux le socle humaniste commun qui unit ces deux hommes. Ces résonances ne sont pas fondées sur la géographie, mais sur le dialogue de cultures et de civilisations à priori étrangères. Or, il existe un pont méconnu entre les cultures qui font notre << Afriqueurope >> – pour mieux dire notre communauté de destin que cette formule giscardienne de l’<< Eurafrique>> qui rime trop avec << Eura-fric>> pour être honnête. Il faut chercher la trace de ce pont civilisationnel dans l’histoire des enfants d’Abraham. Certes, les historiens sont partagés sur la réalité du séjour du peuple juif (à supposer qu’il existait comme tel en ce temps-là) au pays de pharaons et sur l’exode qui a suivi. Mais ce n’est pas essentiel. Il me suffit de savoir que le judaïsme ne s’est pas seulement formé au contact des religions de l’Euphrate et de la Mésopotamie, mais aussi en se frottant à celles d’Égypte. Contrairement aux idées reçues, les échanges entre l’Égypte antique et l’Afrique noire étaient intenses, dans les domaines politiques, commerciaux, civilisationnels et spirituels. Il y a eu plusieurs dynasties nubiennes et les Nubiens, que nous sachions, étaient des Noirs. Or, nous le savons bien, l’Afrique noire, qui est le berceau de l’humanité, forme plus que jamais le terreau de l’humanisme personnaliste qui est celui de l’homme en relation, au-delà des individus chers à la philosophie libérale.
Voir : http://www.personnalisme.org/files/Cahier20.pdf
Après, il y a eu l’hybridation du judaïsme et du christianisme, ce dernier étant une dissidence du premier . Religion prosélyte, à la différence du judaïsme, aussi universel mais pas conquérant pour un sou, sauf hélas en Palestine, le christianisme s’est répandu dans le monde, selon ses différentes confessions : catholiques, protestantes, orthodoxes. L’orthodoxie n’a jamais été portée sur les spéculations intellectuelles, en contraste avec le christianisme d’Europe occidentale (augustinisme, scolastique, vaticinations vaticanes en matière de morale …). Le personnalisme, qui est un humanisme pratique et non spéculatif, dans lequel la vie précède la pensée, a trouvé dans les cultures slaves un nouveau terreau fécond, comme en Afrique. Tout ce que je connais de Vaclav Havel et de ses compagnons de lutte m’est apparu imprégné de personnalisme pratique. Tout comme l’humanisme relationnel du << Muntu - Ubuntu >> de Nelson Mandela. Paraphrasant Alain Peyrefite qui évoquait le réveil de la Chine , « Quand l’Afrique s’éveillera, le monde se libérera des dogmes qui tuent l’humanité que nous partageons « .
Vincent Triest
Animateur de l’Atelier Fédéral Philosophies de la personne (LVN)
Courriel : vincent.triest@skynet.be