Les manouches de Kingersheim ont dit adieu aux caravanes

Publié le 30/09/2010

Par Marie-Anne Lambotte, Secteur politique.

Pour Joe Spiegel, maire de Kingersheim (Haut-Rhin), le projet le plus difficile, le plus passionnant, le plus « humain » de son mandat a été la requalification du quartier des Manouches. Un projet citoyen, solidaire, consenti.
Ces Manouches[[1 – « Manouch », du tsigane manuch « homme ». Manouches en France : des groupes qui y vivent depuis longtemps ou qui viennent des frontières franco-germaniques. A Kingersheim les Manouches forment le groupe sédentarisé le plus important du Haut-Rhin, le quatrième en nombre en Alsace.]], installés depuis les années 30 dans des caravanes sur un terrain insalubre jouxtant une décharge, ont intégré le 25 juin 2007 les 37 maisons à ossature bois construites pour eux à Kingersheim.


Tout est parti d’un constat fait en 1989 par l’équipe municipale : il fallait absolument offrir à cette communauté nomade des conditions de vie plus dignes.

Tout le projet a été mené dans l’esprit des Etats Généraux Permanents de la Démocratie, c’est-à-dire avec un souci constant de la concertation entre élus et techniciens de la municipalité, les familles concernées, les riverains, les associations pour échanger sur les difficultés, la mise en œuvre du projet, et les exigences du « vivre ensemble ».
Le comité de pilotage s’est mis en place en décembre 2004. Il a proposé aux Manouches de quitter leurs caravanes pour habiter des maisons. Les architectes choisis étaient prêts à tenir compte de la culture et des besoins des Manouches et à construire des maisons de qualité. En échange, chaque famille devait s’engager par un contrat individuel à inscrire les enfants à l’école, à respecter la loi (fin des incivilités) et à s’insérer professionnellement.

Le projet a été possible grâce à la coopération financière de l’Etat, du Conseil régional, du Conseil Général, du Fonds d’Aménagement Urbain et de la ville de Kingersheim.

La communauté manouche et la municipalité ont vécu de grands moments : l’affrètement d’un car pour aller visiter les autres sites aménagés pour les Manouches en Alsace, une fête formidable en musique avant de quitter les caravanes, Et des moments de désespérance : des incivilités qui auraient pu tout remettre en question, la peur du changement, le dernier recul avant la remise des clefs – « Nous ne pourrons pas payer le loyer, les écoles… Nous ne pourrons pas nous adapter à toutes ces contraintes… » du côté manouche – « Ils ne vont pas y aller » du côté de la mairie. Joe Spiegel a tenu à souligner le rôle important des femmes dans les discussions. Sans doute parce qu’elle se sentent responsables de l’avenir de leurs enfants.

Et il y a eu aussi les remarques envieuses ou perfides des opposants sur le mode « ne travaillez pas smicards, laissez–vous assister ! »
Au total une centaine de Manouches relogés dans de coquettes maisonnettes dont les architectes sont fiers, car elles intègrent de hautes normes de qualité environnementale et une meilleure intégration dans la vie de la cité.

« La fraternité se construit, mais ne peut se décréter » – dit Joe Spiegel. Ce projet montre bien quelle conviction, quelle qualité de dialogue, quelle participation de toutes les acteurs sont nécessaires pour la mettre en œuvre concrètement .

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