Vers une révolution doublement verte

Publié le 01/06/2010

Ambivalence et fragilité au cœur des équilibres humains

Nadège Chambon, Notre Europe[[1 – Nadège Chambon est chargée d’études à Notre Europe, le groupement d’études et de recherches fondé par Jacques Delors. Retrouvez l’intégralité de la note sur le site de LVN : https://www.lvn.asso.fr/IMG/pdf/Vers_une_revolution_doublement_verte.pdf ]]

Invitée à la Frat des personnalités, Nadège Chambon nous a exprimé sa confiance dans les perspectives d’une Révolution Verte, susceptible de développer l’agriculture en respectant la nature.
Au sein de Notre Europe, elle est responsable du programme PAC 2013 et prépare les 3èmes États Généraux de l’Europe, à Strasbourg le 17 avril[[2 – Les 3ème Etats Généraux de l’Europe à Strasbourg, samedi 17 avril 2010. Le rendez-vous des citoyens de tous âges avec les responsables européens et plus d’une centaine d’organisations. Renseignements :
www.etatsgeneraux-europe.eu ]] .


A l’heure où notre mode de développement menace la durabilité des ressources naturelles, l’agriculteur, premier maillon de la chaîne qui relie l’homme à la nature, est interpellé au premier chef sur l’impact de ses pratiques.

L’agriculture ne porte pas en elle les germes de la destruction des écosystèmes. Au contraire, elle incline favorablement depuis des millénaires les équilibres hommes-nature en sélectionnant les espèces les plus productives et/ou les mieux adaptées aux géographies. Mais en tant que principal facteur de transformation de l’écosphère, elle conditionne depuis le néolithique l’augmentation du nombre des hommes et le développement de catégories sociales ne produisant pas elles-mêmes leur nourriture (M. Mazoyer et L. Roudart).

Essayant de concrétiser les exigences du marché (prix, quantité, qualité) à l’échelle de son exploitation, les questions qui se posent à l’agriculteur sont complexes si ce n’est contradictoires : comment relever le défi alimentaire, écologique et humain, lancé par une croissance démographique mondiale culminant à un pic de 9 milliards d’individus vers 2050 ? que le changement climatique accélère les bouleversements naturels, comment éviter l’épuisement des ressources, les pollutions, l’érosion des sols et les pertes de biodiversité ? Comment se projeter à long terme face à des coûts de production élevés, à des prix instables parfois structurellement faibles, à une concurrence accrue ?

Si l’on veut éviter toute thèse malthusianiste, éviter le scénario apocalyptique de famine et de destruction des ressources naturelles sur lequel nous sommes engagés, la réponse à ces défis de l’agriculture du XXIème siècle réside fort probablement dans les voies explorées par les chercheurs de la « révolution doublement verte ». Ils visent une agriculture à la fois plus productive et plus écologique (d’où le terme de révolution « doublement verte »). La révolution qu’ils proposent, remarquablement explicitée en France par Michel Griffon, cherche à assurer le bond quantitatif nécessaire des productions en s’appuyant sur les qualités intrinsèques des milieux puis en incluant des intrants artificiels seulement « en cas d’absolue nécessité ».

Bien que des perspectives encourageantes soient dégagées par les chercheurs pour répondre au défi alimentaire et environnemental, la révolution doublement verte exige une rupture : tout d’abord des décideurs dans la manière de penser la politique agricole, ensuite des agriculteurs dans leur manière d’intégrer la dimension environnementale, enfin des citoyens dans leur manière de consommer. Dans chacune de ces catégories des changements s’opèrent déjà, mais l’inertie des comportements est difficile à surmonter pour engager le profond bouleversement de pratiques nécessaire.

L’agriculture écologiquement intensive, seule voie d’avenir pour répondre aux défis de moyen terme, explore un nouveau type d’agriculture qui reste à inventer. La transition vers ses pratiques doit être collectivement encouragée par la mobilisation de fonds publics. Cela a un coût dont la société doit être consciente et qu’elle doit être prête à engager dans un contexte sous pression budgétaire forte.

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