Le vide contre le trop-plein !

Publié le 07/10/2009

Yvon Puech, comité de Rédaction

Combattre le « credo » de notre époque : « Toujours plus », prendre conscience que « nous croulons sous le superflu, et le pire c’est qu’il ne nous rend même pas heureux ». Voilà l’objectif de ce petit livre écrit à deux mains par Paul Ariès, politologue et écrivain, qu’on appelle parfois le « pape » de la décroissance (un « mot-obus ») et une journaliste, Bernadette Costa-Prades[[Apprendre à faire le vide, pour en finir avec le « toujours plus », Paul Ariès, Bernadette Costa-Prades. Éditions Milan, 2009, 140 pages.]].


Tout commence par une vaste description-décryptage-démontage de la société, plutôt radicale et sans concessions.

A l’ère de l’hyper-consommation, « on n’achète plus uniquement pour consommer mais pour s’offrir un supplément d’âme ». Le système a cassé non seulement les cultures traditionnelles mais aussi l’individu qui vit dans l’illusion. Illusion que la consommation peut amener le bonheur ! Illusion de « penser que la consommation peut venir compenser la perte des valeurs et des identités ». La pub, le marketing, la société du trop-plein…

« Tout tout de suite » ; « tout doit se voir », « tout doit se dire » (voir certaines émissions de télé). Le téléphone portable est « emblématique de notre société où l’on doit être joignable en permanence ».

Toujours jeune, toujours en forme ! Le culte de la performance… Et « le sentiment de ne jamais être à la hauteur ». En sport bien sûr, mais aussi en amour (« le summum de la dévoration : nous consommer nous-mêmes »). D’où les régimes, le refus de vieillir, le refus du passé…

Autre mot d’ordre : « Travaille, tais-toi et consomme ». Travailler plus pour consommer plus…

Des voix s’élèvent

Le tableau est-il trop noir et surtout trop désespérant ? Faut-il baisser les bras ?

Non, disent les deux auteurs ! Espoir : « des voix s ‘élèvent pour faire entendre une autre musique, des résistances collectives et individuelles voient le jour ».

Face au trop-plein, reste à créer le vide « aujourd’hui comme hier, que ce soit en science, dans l’art, dans la religion », car à l’inverse du néant « qui est stérile et rend fou », le vide est « nécessaire et fécond ». Pas étonnant que le ramadan, le carême, les monastères, la méditation, le yoga, la sophrologie, les randonnées aient du succès. Cela veut dire « que l’on prend conscience qu’on ne peut vivre dans ce flux constant auquel nous soumettent nos vies actuelles ».

Il y a donc des tentatives de faire le vide au niveau individuel : « Chacun cherche, tâtonne, bricole, en fonction de son histoire, de sa culture, de sa sensibilité. Il n’y a pas une tentative plus intéressante qu’une autre : c’est la multitude de ces ballons d’essais autour du vide en soi, l’expérimentation de la richesse de son ressenti, qui sont passionnantes. Tout ce qui nous permet de vivre au plus près de nos valeurs, d’être économe vis-à-vis de la nature, tout ce qui redonne du sens à nos vies mérite attention et considération. Sans exception, sans hiérarchie. »

Parallèlement, existent des expériences au niveau collectif. Par exemple : potagers collectifs, mutualisation des achats, chorales, clubs, assos, AMAP… De quoi prendre conscience qu’il est possible de vivre autrement et éviter le découragement.

Un grand projet de société

Tout cela, estiment les auteurs, a cependant des limites et risque d’être récupéré et recyclé par le système… en dehors d’un véritable projet politique, d’un grand projet de société.

Dans ce livre, les deux auteurs ne proposent pas de programme, mais mettent en avant quelques revendications de base : la gratuité pour les biens nécessaires, l’augmentation des prix pour usage abusif, le revenu universel d’existence et, d’actualité par les temps qui courent, le revenu maximal autorisé…

A crise globale, solution globale. Il ne suffit pas de consommer mieux ou de consommer moins, peut-on lire. Il s’agit aussi de redéfinir la richesse, de retrouver des points de repères de bâtir une société durable…

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