Urgence démographique et migrations

Publié le 22/12/2008

Par Marie-Anne Lambotte, Secteur Politique


Une politique de l’immigration est une question complexe, car elle concerne le pays accueillant et les pays d’origine dont les intérêts ne convergent pas forcément ; car elle concerne des êtres humains qui ont des droits, et elle a des incidences dans de nombreux domaines : travail, logement, droits sociaux, santé, écoles…
Notre gouvernement prône une immigration choisie, au lieu d’une immigration subie. Pour qu’une telle politique soit opérationnelle il faudrait alors des critères pertinents et une mise en œuvre complexe.
L’Union européenne (UE) cherche à harmoniser ses politiques d’immigration. Nous avons tous à l’esprit la directive dite « retour » et le Pacte européen sur l’immigration et l’asile promu par Nicolas Sarkozy et adopté le 17 octobre 2008 par les 27 chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE. Une déclaration politique qui ne remet pas en cause la souveraineté de chaque Etat dans ce domaine. Il s’agit d’organiser une immigration légale fondée sur les besoins et les capacités de chaque Etat et de créer un bureau d’appui européen de l’asile pour échanger des informations, mettre en place un système d’asile commun d’ici 2012. Le risque est que ce système se retrouve sans objet, car l’UE délègue de plus en plus la responsabilité d’examiner les demandes d’asile à des Etats tiers, sans que les droits et la sécurité des personnes soient assurés.

L’UE renforce les moyens de contrôle et de surveillance à ses frontières. Ces dispositifs, extrêmement coûteux et peu efficaces, ne découragent pas les migrants qui prennent de plus en plus de risques et cherchent d’autres voies plus dangereuses (le nombre de morts aux frontières ne cesse d’augmenter). Quant aux accords avec les pays de transit ils ne garantissent pas le respect des droits humains fondamentaux.

Déjà les politiques affichées d’ « immigration choisie » remettent en cause « l’immigration zéro » et la fermeture des frontières. C’est un premier pas des gouvernements, contraints de prendre en compte les déséquilibres à venir entre actifs et inactifs, en raison des évolutions démographiques des prochaines décennies.

La question n’est pas de savoir comment fermer les frontières mais bien plutôt comment accueillir des immigrés dont les économies européennes, marquées par le vieillissement rapide des populations, ont un impérieux besoin. Les migrants qui viennent à la porte de l’Europe ont besoin de trouver du travail mais il est aussi démontré que les Européens ont besoin de recourir à la main-d’œuvre de personnes venues d’ailleurs. La question d’une réciprocité de la solidarité devient alors centrale dans les politiques migratoires. L‘Europe et ses populations doivent organiser l’accueil de ces personnes dont l’apport économique devient indispensable. Les migrants ont des droits, notamment de vivre décemment et avec leur famille éventuellement. Le dialogue avec le reste du monde est nécessaire et possible seulement s’il y a volonté des pays d’accueil de travailler avec les pays d’origine et une volonté politique pour changer le regard de l’opinion publique sur une immigration qui va se poursuivre.

Quels accords les gouvernants des pays d’émigration et les nôtres pourraient-ils bâtir pour que les migrants soient respectés et leur apport économique reconnu dans les pays d’accueil comme dans les pays de départ ?
Quelles législations soutenir pour les immigrants qui souhaitent devenir citoyens d’un pays d’Europe ?
Comment mieux tenir compte des prévisions démographiques pour concevoir une politique d’immigration pour l’Europe ?
Peut-on se contenter d’une vision « utilitariste » des migrations qui seraient justifiées uniquement par des considérations économiques ou démographiques ?
Dans quelles conditions une aide au développement aide-t-elle vraiment la population du pays concerné ?

C’est François Héran, directeur de l’INED (Institut National des Etudes Démographiques) et Sophie Baylac (Cimade, international) qui interviendront à l’atelier urgence démographique animé par Marie-Anne Lambotte et Thérèse Locoh.

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