Le socialisme

Publié le 07/02/2008

Par le comité de rédaction

Rappelé à tout instant à la tribune ou sur les ondes, le mot socialisme est au centre d’une série de perplexités et d’interrogations depuis quelques années :
Est-ce que le socialisme revient à faire du social ?
Est-ce que être socialiste, c’est un peu synonyme d’être de gauche ?
Est-ce que le Parti Socialiste aujourd’hui est socialiste ?
Marx était-il socialiste ?
Etc. J’en passe et des meilleures (ou des pires).


Le dernier congrès de La Vie Nouvelle a montré combien était vif ce débat lorsqu’il s’est agi de garder ou d’abandonner le mot socialisme dans la charte du Mouvement.

Certains ont réaffirmé leur appartenance à la gauche et souligné que cette appartenance leur semblait naturelle et indispensable.
Que de déni, que de renoncement si l’on efface un mot, qu’on rejette un parti qu’on a contribué à créer (dans son existence actuelle) au début des années 70 (au Congrès d’Épinay, notamment où La Vie Nouvelle était l’un des groupes de réflexion) !

Pour d’autres (les mêmes peut-être ?) le parti socialiste a tellement navigué dans des eaux ambiguës depuis 25 ans, qu’on ne sait plus comment définir le mot. De plus, l’actualité nous rappelle tous les jours que le sens du mot (revendiqué par les travaillistes anglais, par les communistes vietnamiens, ou par bon nombre de partis africains) varie considérablement d’un pays à un autre.

Cependant, la vie politique continue, de nouvelles élections se profilent en France. Et des hommes politiques, des militants vont se réclamer du socialisme.

Pas question d’échapper à ce terme ou à cette notion.
Au Comité de rédaction nous avons donc pensé qu’il fallait le retrouver, le réinitialiser comme on fait en informatique et que la meilleure manière était de lancer un appel à témoignages à chacun d’entre nous, dans et autour de La Vie Nouvelle : comment aujourd’hui vivez-vous le socialisme, concrètement dans votre vie de militant, de personne engagée.

Qu’est-ce qu’il représente ? Qu’est-ce qu’il inspire pour votre action ?
Lecteurs de Citoyens, vous êtes tous, à un titre ou à un autre, des acteurs, des témoins , susceptibles d’apporter votre expérience personnelle à la réflexion commune, dont ce journal se fait l’écho.
Nous attendons donc des interviews, des témoignages, des expériences qui permettront à tous de mieux définir et de mieux s’approprier le mot Socialisme, pour mener une action plus authentique et plus efficace.

Petites anecdotes significatives, longs témoignages édifiants, interviews instructifs…
Envoyez-nous rapidement vos textes ou prenez contact avec un membre du comité de rédaction.

Socialisme : parcours tortueux du mot
Le socialisme est un mot d’invention relativement récente bâti sur une étymologie ancienne (du latin socius : compagnon, allié, ou encore mis en commun, partagé[[D’après Eugène Benoist et Henri Goelzer, Nouveau dictionnaire latin-français, Librairie Garnier]]).
La première apparition du terme est attribuée à Pierre Leroux, dans un texte de 1831-1832. Celui-ci avait eu recours à ce néologisme pour résister à la tentation de chercher dans la collectivisation généralisée le remède au fléau de l’individualisme. Il décrivait le socialisme comme « la doctrine qui ne sacrifiera aucun des termes de la formule Liberté, Égalité, Fraternité [[Leroux apporta en outre une participation majeure à la reconnaisance de cette formule révolutionnaire comme principe de la République, se traduisant par son adoption en tant que devise nationale le 24 février 1848.]]».
Appuyant sa vision sur une anthropologie philosophique, et bien qu’il aimait à se dire le « quatrième socialiste » après Fourier, Saint-Simon et Owen, Leroux se distingue du courant du socialisme utopique et plus dogmatique auquel on rattache ses prédécesseurs.
Le socialisme désigne un système d’organisation sociale basé sur la propriété collective (ou propriété sociale) des moyens de production, par opposition au capitalisme. Il est l’objectif de divers courants apparus et développés depuis le XIXème siècle, et ayant abouti aujourd’hui aux différents courants marxistes et anarchistes, ainsi qu’aux sociaux-démocrates.
Le mouvement socialiste recherche une justice sociale, condamnant les inégalités sociales et l’exploitation de l’homme par l’homme, défend le progrès social, et prône l’avènement d’une société égalitaire, sans classes sociales.
Selon une définition révolutionnaire ou réformiste, le socialisme ne peut être que l’abolition complète du capitalisme et son remplacement par une société socialiste et l’appropriation collective des moyens de production, au moyen d’une révolution ou d’une série de réformes.
Selon une conception sociale-démocrate, qui s’appuie sur les élections, le socialisme peut être réalisé sans nécessairement s’affranchir du capitalisme, et par compromis (provisoires ou durables) avec l’économie «libérale». Cette vision du socialisme, qualifiée de «modérée» ou désignée par le terme sociale-démocratie dans le langage politique actuel, n’est pas reconnue comme véritablement «socialiste» par les tenants plus radicaux du socialisme[[A cet égard, on peut notamment citer Troelstra, à la tête du parti socialiste néerlandais : « La social-démocratie n’est dans son programme politique qu’une forme logique de la démocratie bourgeoise… »]].
Au XIXème siècle, deux partis se réclamaient du socialisme : le Parti Socialiste Français et le Parti Socialiste de France. Tous deux fusionnèrent pour créer la SFIO (Section Française de l’Internationale Ouvrière), où le mot socialiste avait curieusement disparu.
Il fallut attendre cinquante ans pour voir réapparaître le mot avec la naissance du Parti Socialiste autonome, qui devint le Parti Socialiste Unifié en 1960.
Ce n’est qu’en 1971, au 58ème congrès de la SFIO, que le Parti Socialiste (re)vit le jour.

Et le socialisme aujourd’hui, toujours anticapitaliste… ?

Aujourd’hui, les partis de gauche ont conscience que l’année 2008 sera celle des reconquêtes. Marylise Lebranchu, députée PS du Finistère, dans un article publié dans le Monde[[Dans la page Débats du mardi 8 janvier 2008.]] espère « une gauche qui dira comment produire les richesses de notre pays pour ensuite les répartir avec justice ». Et elle poursuivra évitant soigneusement d’utiliser le mot socialisme, préférant l’expression « transformation sociale durable », qui laisse une part d’incertitude.

S’il prétend ne pas en savoir plus, le porte-parole de la Ligue Communiste Révolutionnaire, Olivier Besancenot, se fixe la tâche d’en réinventer la notion. Interrogé dimanche 6 janvier[[Au Grand jury RTL-le Figaro-LCI.]], il affirme qu’il s’agit « de reconstruire d’abord un nouveau mouvement social, et au sein de ce mouvement social, de réhabiliter une perspective anti-capitaliste», « c’est-à-dire d’être capable de réinventer, refonder ce qui pourrait être le socialisme du XXIème siècle ».

De l’autre côté du court, Nicolas Sarkozy, lifte habilement ses balles sur le côté droit et le côté gauche du terrain politique, contribuant à brouiller durablement les esprits. Julien Dray, porte- parole du Parti Socialiste, affirme (le 25 novembre dernier) que le président lui aurait proposé un ministère. Et, dernière ouverture en date, Sarkozy ne vient-il pas de solliciter des économistes qu’on qualifie ordinairement d’anticapitalistes, ou du moins très critiques vis-à-vis du libéralisme. Ainsi dans sa conférence de presse du 8 janvier, M. Sarkozy s’est engagé à mener « une réflexion « sous l’égide de deux prix Nobel d’économie, Amartya Sen[[ Dont nous avions publié un intéressant article dans le numéro 320, juillet 2006.]] et Joseph Stiglitz « pour changer l’instrument de mesure de la croissance ».

Ce débauchage industriel, peut être interprété sous un angle positif : on fait profiter à la collectivité de tous les talents, ce qui importe étant les hommes honnêtes et compétents. Ou négatif : les principes n’ont plus aucune pertinence. Tout se vaut, nous sommes tous tenants d’un même système politique comportant seulement des nuances entre lesquelles on peut louvoyer et qu’on peut ajuster après enquête et avis des technocrates.

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