Les objectifs de l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité : une modification de la loi française

Publié le 17/12/2008

Par Paul Lallot et Michèle Duron, Groupe de Montluçon

« Si vous deviez être malade vous souhaiteriez pouvoir : – bénéficier des meilleurs moyens de lutte contre la douleur, – refuser les abus de l’acharnement thérapeutique, – faire prévaloir vos volontés sur celles du corps médical, – être aidé à mourir, à votre demande, en cas de phase avancée ou terminale d’une maladie. »
C’est pour que ces droits s’inscrivent dans les faits et dans la loi qu’existe l’ADMD (association pour le droit de mourir dans la dignité).


Pour connaître les objectifs de l’ADMD, il suffit de consulter deux documents de base : 
• Le Livre blanc remis par l’ADMD à tous les politiques avant la campagne présidentielle[[1 – Fin de vie. Une nouvelle loi est indispensable : Livre blanc de l’ADMD.
50, rue de Chabrol 75010 PARIS e-mail :
info@admd.net]].
• Le livre Fin de vie de Gilles Antonowicz[[2 – Fin de vie. Tout savoir sur vos droits de Gilles Antonowicz, avocat. Préface de Michel Rocard. 100 questions, 100 réponses. Clair, précis. Editions de l’Archipel.]].

Les deux premiers objectifs (lutte contre la douleur et refus de l’acharnement thérapeutique), maintenant inscrits dans la loi, sont encore insuffisamment respectés, alors que les deux autres (prévalence de la volonté du malade sur la philosophie du médecin, et aide à mourir à la demande du malade) ne sont pas inscrits dans la loi française.
C’est donc à la fois pour faire appliquer la loi existante, et pour la faire évoluer, que milite l’ADMD qui met en avant certains faits. Des faits qui motivent l’action de l’ADMD.

Situations

Il y a des personnes qui, souffrant physiquement ou moralement de façon intolérable, demandent une aide à mourir légale (euthanasie ou suicide assisté) qui leur permette de mourir paisiblement, quand elles le souhaitent, entourées de leurs proches. Or, la loi française (dite loi Léonetti du 22 Avril 2005) n’autorise pas cette aide[[1 et 2]].

Il y a une double inégalité devant la mort : en effet, selon sa philosophie et son courage, le médecin s’autorisera ou non à transgresser la loi pour respecter la volonté du malade (lire l’encart :inégalité devant la mort), ensuite selon leur profession, ou leurs relations, une minorité de malades pourront se débrouiller seuls – et discrètement, ou aller mourir à l’étranger[[
3 – Interview de Maïa Simon sur le site :
www.rtl.fr]].

On évalue à 12 000 par an le nombre d’euthanasies clandestines en France. Et on se satisfait du « pas vu pas pris ».

L’ADMD pense que ne pas légiférer c’est maintenir l’arbitraire : des euthanasies sont pratiquées sans l’avis du malade, d’autres refusées alors que le malade la demande et que son état pourrait la légitimer.

C’est en outre « placer le médecin dans des situations intenables entre son devoir d’humanité et les risques judiciaires » selon le Syndicat MG France, 14 Juin 2006. C’est ce qui conduit 2 314 soignants (médecins, infirmiers, cadres ou aides-soignants) à demander, dans une pétition, une révision de la loi qu’ils déclarent avoir eux-mêmes transgressée en accordant une aide active à mourir[[
4 – Pétition Nous soignants, avons, en conscience… sur le site www.nouvelobs.com]].

La loi de 2005 se limite à l’institution d’un droit au refus de tout traitement, associé à l’usage de produits destinés à soulager la douleur (même au risque d’abréger la vie). Autrement dit, elle institue le droit au « laisser mourir », situation qui peut durer des jours ou des semaines après l’arrêt des soins curatifs ; et particulièrement de la nutrition et de l’hydratation. Même accompagné par des soins palliatifs, ce laisser mourir peut, pour telle ou telle personne, ne pas être la fin de vie la plus humaine.

Un autre modèle de directives anticipées

La loi de 2005 institue pour toute personne majeure la possibilité de rédiger des directives anticipées et de désigner une personne de confiance, pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté (directives et désignation à confirmer tous les trois ans, et révocables à tout moment). Le médecin doit en prendre connaissance, et en « tenir compte ».

L’ADMD propose un modèle de directives anticipées : légalement, le médecin ne peut « prendre en compte » que les trois premiers points. L’ADMD demande que l’obligation de respecter entièrement ces directives soit inscrite nettement dans une nouvelle réglementation, le médecin étant libre d’opposer sa clause de conscience mais tenu alors d’orienter le malade vers un confrère.

Les dernières propositions de loi en ce sens émanent de Henriette Martinez (UMP), de Laurent Fabius (PS), et des Verts[[5 – Propositions de loi Martinez-Fabius-Verts :
www.admdblog.fr. La proposition de l’ADMD figure dans les documents 1 et 3.]]. Le gouvernement les mettra-t-il à l’ordre du jour de l’Assemblée ?

Ailleurs…

D’autres Etats européens précèdent la France sur le chemin souhaité par l’ADMD : Pays-Bas, Belgique, Suisse, et tout récemment le Luxembourg. Pour se faire une opinion, il est indispensable de se baser sur des documents qui rendent compte de l’évolution de leurs pratiques :
• le journal du Réseau Cancer de l’Université Libre de Bruxelles, n°8 (Juillet, Août, Septembre 2007) : le bilan de l’application de la loi dépénalisant l’euthanasie : www.jcancerulb.be
• Commission Fédérale de Contrôle et d’Evaluation de l’Euthanasie (Belgique) – 3ème rapport aux chambres législatives www.health.fgov.be/euthanasie.

On y verra par exemple, estime l’ADMD, en étudiant le récapitulatif général pour les années 2006-2007, que rien ne confirme les dérives annoncées par certains.

Cas particuliers

Un fait reste hors du champ d’action de l’ADMD. Il s’agit d’un triste record détenu par la France : chaque année 3 500 suicides de personnes âgées de plus de 70 ans (pour les hommes, le taux de suicide après 84 ans est dix fois plus élevé qu’entre 15 et 24 ans). Or, souvent il ne s’agit pas de personnes gravement malades. Elles veulent simplement éviter la dépendance, la perte de leurs facultés mentales, ou, comme Mireille Jospin à 92 ans, elles éprouvent cette grande fatigue qui enlève le goût de vivre. André Perdriau, à 84 ans, après un AVC, redoute une aggravation et « la décrépitude »[[
6 – Lettre d’André Perdriau, doyen honoraire de la Cour de Cassation, accompagnant son suicide (sur demande : e-mail : info@admd.net)]]. Il y a aussi les couples, souvent très unis, qui, après une longue vie commune, veulent « partir ensemble » lorsque l’un des deux est gravement malade : le couple Quillot, André Gorz et son épouse, et beaucoup d’autres, si l’on en juge par les faits divers, ou par les appels au secours lancés par des couples âgés dans le bulletin de l’ADMD (lire l’encart : un appel parmi d’autres).

Aucune des propositions de loi mentionnées plus haut, (ni même la loi réclamée par l’ADMD), ne répondrait à la demande d’aide active à mourir de la personne qui, dans chacun de ces couples, n’est pas malade.

Partager cet article :

S'inscrire à la newsletter

Newsletter

Suivez l'actualité de l'Association LVN avec la lettre d'information trimestrielle