Changer de modèle

Publié le 14/06/2012

Claire Papy, Michel Le Creff, Atelier Politique

Les participants de l’atelier emploi du 14 janvier étaient divers et motivés : demandeurs d’emploi, travailleurs sociaux, directeurs de ressources humaines, associatifs (Solidarité Nouvelle face au Chômage), petit entrepreneur, Economie sociale et solidaire…


En cherchant les causes du chômage, nous avons constaté comme une peur d’embaucher de la part des entreprises, même quand il y a des commandes, découragées qu’elles sont par la complexité des démarches. Pôle Emploi ne marche pas : en France, on a peur de la différence, du « hors standard » (reconversion, école inconnue, personnalité ou parcours atypique). Les offres de Pôle Emploi sont parfois tellement mal ficelées et ingérables pour l’employé que souvent elles ne trouvent pas preneurs (200 000 offres d’emploi non pourvues). Puis nous avons étudié ce que les partis proposent pour s’attaquer aux causes du chômage (tendances de fond auxquelles s’ajoutent les difficultés conjoncturelles). On n’a gardé ici que celles des partis de gauche.

1 – La course à la productivité a poussé tous les secteurs d’activité à accroître la charge de travail des travailleurs au détriment de l’emploi et des conditions de travail dans l’agriculture, l’industrie et les services. Plusieurs partis proposent de « travailler mieux pour travailler tous » : revitaliser le droit du travail (inspecteurs), démocratiser la gouvernance des entreprises, passer d’une agriculture productiviste à une agriculture respectueuse de l’environnement en créant des emplois.

2 – Les mutations techniques, la révolution numérique en particulier, permettent des gains de productivité et détruisent des emplois dans l’industrie et les services. Il faut un grand effort de formation pour adapter aux nouvelles technologies les personnels touchés par les licenciements ou le chômage partiel, pour assurer la conversion écologique, et un effort de recherche, en particulier dans le bâtiment, les transports, les nouveaux matériaux, les énergies renouvelables…

3 – Les entreprises transnationales ont fait la mondialisation en délocalisant leurs activités vers des pays à bas coût de main-d’œuvre ou peu regardants sur les conditions environnementales de production. Pour rétribuer leurs actionnaires, elles ont comprimé leurs coûts salariaux et n’ont pas assez investi en France. Elles sous-traitent en France une partie de leurs activités à des TPE ou PME. Propositions de la gauche : lutter contre les licenciements boursiers, promouvoir la coopération entre petites et grandes entreprises, développer l’ESS, négocier au niveau européen et mondial de nouvelles normes intégrant empreinte écologique, critères sociaux (structure de l’emploi et niveau de rémunération) et taxer les produits importés ne respectant pas ces normes. Il faut instaurer la responsabilité sociale et environnementale des entreprises.

4 – L’Etat n’a pas encouragé l’entreprenariat ni la création de moyennes entreprises, qui font défaut en France et seraient créatrices d’emploi. Privilégiant les grands groupes susceptibles d’exporter ou de prendre des parts du marché mondialisé, il n’a pas eu de politique industrielle pour investir dans la recherche et les technologies innovantes (le photovoltaïque par exemple). La gauche propose une autre fiscalité des entreprises, avec harmonisation européenne contre le dumping fiscal. Elle veut drainer l’épargne vers l’investissement productif en créant des banques publiques d’investissement au niveau national et régional pour réindustrialiser et encourager la recherche dans les entreprises de taille intermédiaire.

L’Etat supprime des emplois dans la fonction publique avec la RGPP (Révision générale des politiques publiques), et en outre la mise en concurrence des services publics voulue par l’Union européenne conduit à remplacer des emplois stables par des emplois précaires. La gauche remet en cause la RGPP. En s’appuyant sur l’ESS, elle veut développer et professionnaliser les services à la personne, de la petite enfance aux personnes âgées, et maintenir des services dans les territoires délaissés des campagnes ou des banlieues.

5 – La mauvaise utilisation de la force de travail se manifeste par l’ampleur du chômage des jeunes et des seniors et une répartition du travail très inégale : recours massif aux heures supplémentaires pour les uns, travail inexistant ou précaire pour les autres. La gauche propose de partager le travail, d’améliorer l’orientation et la formation des jeunes, et tout au long de la vie.

Ces projets politiques pour 2012 ne sont pas chiffrés et peuvent paraître utopiques en pleine crise, quand la récession diminue la demande des consommateurs et des entreprises, et que l’ampleur de la dette publique incite le gouvernement à des plans de rigueur. Mais au-delà des mesures d’urgence (emplois aidés par exemple) il faut changer de modèle et penser pour le long terme.

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