Les associations, acteurs majeurs de la vie politique ?

Publié le 05/11/2010

Par Michèle Le Bars, Secteur politique

L’époque est marquée par le refus d’adhérer à un projet globalisant, mais les citoyens ne se désintéressent pas du politique. Ainsi apparaissent de plus en plus d’associations à objectif politique unique. C’est la possibilité de s’impliquer totalement sans perdre son individualité. On s’engage sur un objectif précis : RESF[[Réseau Education Sans Frontières, qui soutient les enfants étrangers scolarisés me-nacés d’expulsion http://www.educationsansfrontieres.org/]] est un exemple typique. Capables de donner plus de visibilité à leurs idées, des citoyens actifs n’hésitent pas à attirer les médias en créant des images fortes. Pensons aux enfants de Don Quichotte ou à « Jeudi noir », ces images fortes qui souvent cachent… un manque patent de militants !


Les associations parviennent à influer sur des décisions politiques par des actions de lobbying. Autrefois, à Londres, les membres du parlement recevaient leurs électeurs dans le « lobby », le foyer de la chambre des communes pour y entendre leurs suggestions. Ce mot a pris une connotation négative, car beaucoup y voient un outil pour séduire la classe politique. Ceux qui suivent la vie de l’UE à Bruxelles sont complètement conscients de la réalité du lobbying et aussi de sa nécessité car il apporte aux politiques la connaissance du terrain, des réalités. Ce peut être aussi, malheureusement, un lieu de corporatisme effréné.

Les associations pèsent de plus en plus en politique

A cause de cette connotation négative, les associations préfèrent employer le mot « plaidoyer » qui signifie plus : parler au nom d’une valeur, éveiller la conscience politique autour d’un problème donné. Cela fait des années que des associations, comme le CCFD ou « Justice network » par exemple, forment leurs membres au plaidoyer ! Il s’agit dans tous les cas de stratégies d’influence sur les décisions politiques.

Et les partis ?

« S’encarter », quelle horreur ! Le concept de parti renvoie à deux faits qui font que l’adhésion y est difficile :

– le discours sur le monde dans un parti politique est totalisant, il faut adhérer à un groupe de pensées et de valeurs communes ;
– les partis sont des agents de conflit, puisque le discours qui y est développé s’oppose à d’autres. Et ces conflits naissent à l’intérieur même !

Ces dernières années, avec la pensée « alter », on a plutôt vu fleurir des collectifs, des mouvements, des forums, des coordinations, signes d’une grande défiance par rapport aux expériences passées, syndicats et partis. Ainsi, Les Verts ont longtemps hésité à devenir un parti et Europe Ecologie ne s’y résout pas.

Ce refus de s’engager dans un parti est lié aussi au peu d’estime envers les élus politiques, soupçonnés de n’agir qu’en vue de leur réélection. Or, comme le développe Marcel Gauchet dans son livre L’avènement de la démocratie cité sur son blog, l’élu est double : il agit en fonction du mandat qui lui a été octroyé en essayant de correspondre aux vœux de ses concitoyens, mais il fait un second métier, caché, officieux : il a le sens du politique, il a des convictions.

N’oublions pas que les partis sont les enfants de la démocratie ! Ils représentent le mode « normal » d’accès au pouvoir. Quoique, aujourd’hui, bien des repères soient bouleversés : les associations ont de plus en plus d’élus et les listes établies par les partis font la part belle à la société civile pour peu qu’il s’agisse de personnalités médiatiques, de quelqu’un issu de l’immigration ou d’une femme… jeune. Les militants formés, compétents et engagés se sentent relégués ! Adhérer à un parti, c’est, ou c’était, débattre et décider des listes de candidats aux élections. Or, si on généralise des primaires à gauche, selon des modalités non définies (et pourtant votées par les adhérents du PS), on ne pousse pas à l’adhésion car on pourra de toutes façons peser le jour des primaires.

Si on reconnaît le rôle politique des associations, qui prennent souvent de vitesse et de radicalité le monde politique, celui-ci est le seul à pouvoir traduire les tendances qu’elles expriment : sans mandat électif, on ne change pas la société.

Pour Jacques Delors, « le » politique désigne l’engagement au service du bien commun et « la » politique renvoie à l’affrontement partisan avec tous ses travers. « Si l’on veut vraiment agir politiquement, il est impossible de dissocier les deux, cette distinction totalement artificielle ouvre la porte à tous les renoncements. » (La Vie, 18 février 2010).

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